Depuis quatre ans de présence au CA, dans cette dernière lettre, je voudrais analyser et donner mon avis sur quelques questions qui m’ont préoccupé, spécialement durant les deux dernières années pendant lesquelles je fus présidente du CA de la FIMEM.
Je commencerai par apprécier le grand travail et l’enthousiasme des mouvements organisateurs des dernières RIDEFs. Dans chacune d’elles on s’est préoccupé de maintenir la cohérence avec la pédagogie Freinet et avec les thèmes proposés. Thèmes qui répondaient aux défis de l’humanité et aux questionnements que nous nous posons en tant qu’enseignants de cette époque que nous vivons. Enseignants qui n’ignorons pas la réalité de notre monde, caractérisé par de profonds déséquilibres, par des injustices, par un modèle de développement néolibéral, basé sur les lois du marché et qui agissent sans respecter les Droits de l'homme et les inégalités, de ce fait, augmentent. Mais le travail fait, les réflexions, les débats et les conclusions, ne peuvent pas rester dans le lieu de la rencontre et cela doit être le point de départ du travail des mouvements fédérés et dans chaque école où la pédagogie Freinet est pratiquée.
Si nous sommes capables d’aller en reconnaissant les avancées conceptuelles et pratiques, les approches théoriques et les pratiques éducatives qui sont apparues dans les dernières RIDEFs, notre passage dans chaque rencontre n’a été fertile. Nous devons nous demander comment nous avons changé nos écoles pour promouvoir la sensibilisation et des actions responsables sur l'environnement naturel qui nous entoure, nos actions pour promouvoir l'équité et la justice pour les femmes et les filles dans notre maison, dans notre école, dans notre communauté, et dans nos mouvements régionaux et nationaux, comment nous allons promouvoir la participation démocratique des filles et des garçons dans les décisions qui les concernent, au sein de l’école, de la ville et de la famille. Il est donc nécessaire de faire un exercice profond de réflexion pour découvrir la cohérence de nos actions et la façon dont nous assumons nos engagements dans la lutte pour les familles, les écoles, les sociétés et les mouvements pour qu’elles soient plus libres, démocratiques, inclusives et équitables.
Lors de la RIDEF 2012 a été commencé une reconnaissance des femmes de la FIMEM et le travail accompli par elles, comme en témoigne le dossier de la rencontre distribué à Reggio Emilia. Si cette reconnaissance a lieu également dans chaque mouvement cela nous permettra dans les rencontres futures à laquelle nous participons de découvrir l'importante contribution à l'Ecole Moderne de la part des femmes de notre mouvement; comme par exemple le travail bien fait, la détermination et la lutte permanente de nos camarades africaines.
En Italie nous avons voulu organiser un débat sur la laïcité. Certaines personnes disent que c’est un vieux débat ancien, et qu’il est fatigant et ennuyeux de parler de la laïcité, mais peut-être devrions-nous nous demander pourquoi on le propose à nouveau de temps en temps et si le vrai débat n'a pas encore été fait.
À mon avis, nous avons encore perdu l'occasion de discuter en profondeur le concept de la laïcité, qui n'est pas la même chose que l'utilisation d'un vêtement, les discussions sur le voile de certains groupes n'ont pas répondu à la discussion soulevée par le CA. Si nous parvenons à des conclusions et des points de rencontre qui nous aident à aller de l'avant, nous devons lire et réfléchir, individuellement et collectivement, dans chacun de nos mouvements et venir avec des concepts clairs et des propositions concrètes.
Quand nous parlons de la laïcité, nous nous souvenons d’où nous sommes venus. En 1927, les statuts de la Coopérative de l’Enseignement Laïc (CEL) ont été votés et est né le mouvement Freinet. La laïcité, selon le sens qui lui est donné dans la Charte de l'Ecole Moderne, est celui de travailler pour les valeurs de justice sociale, pour la liberté d'expression, la démocratie, la dignité humaine, le respect et la promotion des droits de l'homme. C’est le contraire du fanatisme, du dogmatisme, de la superstition, de la pensée unique, et des valeurs absolues.
Pour faire avancer le développement de l'éducation laïque, nous devons nous demander ce que nous avons concrètement pour nous opposer à la pensée hétéronome, aux croyances aux vérités absolues, à la superstition, au fanatisme, à la vassalité et au dogme magico-religieux qui place les femmes et les filles dans une position d'infériorité par rapport aux hommes.
Qu'on veuille ou qu’on ne veuillent pas voir, nous avons un problème dans la FIMEM, dont nous ne sommes conscients que pendant RIDEFs; ce problème a à voir avec une idée de la religion comme unique philosophie de vie et certaines pratiques promues par ces religions qui ont pris racine auprès de certains participants des rencontres qui ne se rendent pas compte que l'espace public, de tous et de toutes, n’ est pas de prier, ni de faire des manifestations publiques de leurs propres croyances, personnelles et donc privées.
Si nous sommes membres de la FIMEM, nous avons un engagement à la philosophie de l'École Moderne, et donc de collaborer avec les institutions de l'environnement dans lequel nous vivons, avec les représentants sociaux, le bénévolat social, avec des représentants du monde de l'éducation pour promouvoir, un enseignement public gratuit laïc, qui intègre tous les élèves; les filles et les garçons ayant des caractéristiques différentes, que ce soit ou non des déficiences physiques ou mentales.
Je dois exprimer ma profonde déception face au fonctionnement du CA. Son travail n'a pas répondu à ce qui devrait être un conseil d'une fédération, dont le principal signe d’identité est la coopération. Quelques personnes ont dû prendre une charge de travail lourde et un souci constant pour faire avancer les travaux. La cause principale soulignée est le manque de maintien des personnes élues; l'article 12 du règlement stipule que le CA est renouvelé par tiers tous les deux ans, et le fait que du CA élu en 2010 il ne restait qu’une seule personne à la RIDEF 2012 À cela il faut ajouter que, dans la première réunion du CA résultant de l’élection lors de l'Assemblée Générale de León n'étaient pas présents deux de ses membres et que l'un d'eux a démissionné six mois après.
Lors de la réunion en 2013, à Mestre, nous avons dû définir et planifier à nouveau notre travail et préciser les fonctions de chaque membre du conseil d'administration jusqu'en 2014.Après avoir accepté la façon de s'organiser et de faire les tâches, comme indiqué dans Infor 63, le fonctionnement du CA ne s'est pas améliorée. Les prochaines Assemblées devront trouver des solutions à ces situations.
Je ne peux conclure sans faire des vœux pour l'avenir de la FIMEM. Freinet est mort en 1966, mais le mouvement international qu’il a initié, est toujours vivant. Chaque enseignant qui étudie dans la classe et qui partage avec son groupe coopératif, fait avancer la pédagogie de l'Ecole Moderne. Le travail éducatif aujourd'hui implique un approfondissement de notre pédagogie créative, mettant l'accent sur l'équité, la participation croissante des élèves, le respect de la nature, l'histoire quotidienne et les problèmes sociaux. La FIMEM est née il y a plus de cinquante ans, mais leurs idéaux sont hier comme aujourd'hui, modernes, populaires, laïcs, et la liberté et la responsabilité individuelle et collective.
En ce sens, beaucoup de nos mouvements sont à enquêter et à faire des contributions pertinentes: la éducation pour l’égalité de chances filles/garçons, pour la paix, le respect des droits de l'homme, la citoyenneté, l'inclusion de toutes les différences et la participation au développement communautaire; Comme cela a été révélateur dans nos réunions. A Reggio Emilia il s’est formé un groupe de jeunes enseignants à participer à leur première RIDEF, que nous accueillons et nous nous réjouissons de les rencontrer à la prochaine rencontre.
Longue vie à la FIMEM !
Août 2014
Pilar Fontevedra Carreira